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22 octobre 2023

Jean-Philippe Thibault - jpthibault@medialo.ca

Front commun contre la fusion de Gaspé et de Bonaventure

GASPÉ

Carte électorale

©Image Commission de la représentation électorale du Québec

L’Association québécoise des retraités de la fonction publique et parapublique de la Gaspésie (AQRP), les MRC du Rocher-Percé et de La Côte-de-Gaspé, l’exécutif local du PQ pour la circonscription de Gaspé et Culture Gaspésie ne sont que quelques exemples triés sur le volet de ceux qui ont pris la parole dans les derniers jours pour dénoncer la proposition de fusionner les circonscriptions de Gaspé et de Bonaventure.

Après la motion unanime adoptée la semaine dernière par les députés de l’Assemblée nationale, l’idée de la Commission de la représentation électorale semble rallier bien peu de gens à l’extérieur du cercle des fonctionnaires.

L’AQRP se questionne notamment pourquoi le Directeur général des élections (DGE) choisit d’accorder plus de valeur au principe de l’égalité des votes des électeurs de la province au détriment de celui de la représentativité effective. « La réalité qui prévalait pour justifier le maintien des circonscriptions électorales lors des exercices antérieurs est toujours la même et rien d’autre aujourd’hui ne justifie l’abolition d’un comté et d’un député à l’Assemblée nationale », explique le président de Marcel Landry.

Les circonscriptions de Gaspé et de Bonaventure ont joui de statuts d’exception lors des deux exercices de redécoupage électoral en 2011 et 2017. La plus récente Commission avait pris en considération « le sentiment d’appartenance des citoyens à leur communauté ainsi que les réalités géographiques » pour motiver cette décision. Les circonscriptions de Bonaventure et de Gaspé ont une population électorale avec des écarts par rapport à la moyenne de 51 000 électeurs de -29,2 % et de -40,6 %, au-delà de l’écart de ±25 % recherché.

Pour sa part, l’exécutif local du PQ pour la circonscription de Gaspé rappelle que le pouvoir politique des régions rurales s’érode depuis longtemps. « Il s’agit ici de préserver la voix des régions qui, du fait de leur éloignement, se font historiquement moins bien entendre dans les centres de décision », estime le président, Ludovic Landry-Ducharme.

Comme plusieurs, celui-ci souligne également que la représentativité effective ne se limite pas à une simple question de démographie et que ce concept est compromis par l’actuelle proposition.

Loi à géométrie variable?

 

Le maire de Gaspé et préfet de La Côte-de-Gaspé, Daniel Côté, a déjà jeté plusieurs pavés dans la mare à cet effet en rappelant qui si la Commission de la représentation électorale fait grand état de l’arithmétique sous-tendant la Loi électorale, elle oublie souvent d’en présenter le portrait global. « Ils veulent se faire la vie facile, mais ils oublient de nous dire qu’ils n’ont pas le choix d’appliquer la représentativité effective », précise-t-il.

Daniel Côté rappelle que les facteurs géographiques, l’étendue du territoire et l’appartenance des électeurs à ce dernier doivent aussi être des variables considérées dans l’équation pour le redécoupage électoral. « Ils oublient d’appliquer ces articles-là de la loi. La mathématique, c’est facile à calculer. Un robot pourrait faire leur job à ce compte-là. Mais ce sont des humains à la Commission et j’aimerais qu’elle arrête de nous induire en erreur en appliquant la loi dans son ensemble plutôt qu’un seul article. »

Daniel Côté

©Jean-Philippe Thibault - Chaleurs Nouvelles

Daniel Côté, maire de Gaspé et préfet de La Côte-de-Gaspé.

L’article 15 de la Loi électorale prévoit qu'une circonscription « représente une communauté naturelle établie en se fondant sur des considérations d’ordre démographique, géographique et sociologique […] les frontières naturelles du milieu ainsi que les territoires des municipalités locales. »

Le maire et préfet demande du même coup que la MRC de La Haute-Gaspésie reste en Gaspésie. L’exécutif local du PQ a fait de même, tout comme le député de Gaspé, Stéphane Sainte-Croix. La Commission propose actuellement de transférer La Haute-Gaspésie au Bas-Saint-Laurent, dans la circonscription de Matane-Matapédia.

« La constante instabilité que subit cette région ballottée périodiquement entre les deux comtés ne fait qu'ajouter aux nombreux défis socio-économiques auxquels elle est confrontée. Il est essentiel de respecter la population qui mérite une stabilité politique », précise Ludovic Landry-Ducharme. « En rattachant la MRC de la Haute-Gaspésie à un comté du Bas-Saint-Laurent, elle serait isolée des autres MRC de la Gaspésie », ajoute Stéphane Sainte-Croix.

Samuel Parisé

©Photo tirée de Facebook - Marie-Soleil Dea

Samuel Parisé, préfet du Rocher-Percé.

Le préfet du Rocher-Percé, Samuel Parisé, n’est pas plus impressionné par la suggestion de faire fusionner Gaspé et Bonaventure. « On a une certaine particularité tant territoriale que des communautés naturelles. On veut avoir une représentativité à hauteur et à échelle de notre région. La Gaspésie c’est la même grandeur que la Belgique. Si on a une seule personne pour défendre nos intérêts et s’assurer qu’il n’y ait pas du mur-à-mur dans l’ensemble des politiques, lois et règlements, ça va être beaucoup plus difficile. »

Culture Gaspésie a également joint sa voix au discours. « Chaque fois qu’on tente de nous réduire au silence, ce sont nos réalités régionales qui ne se rendent plus à l’Assemblée nationale, estime la directrice générale, Céline Breton. En tant qu’organisme de développement économique représentant le secteur culturel sur plusieurs instances au national, je peux témoigner qu’il faut très souvent illustrer que les décisions qui semblent bonnes en région urbaine ont souvent des impacts bien différents dans les régions éloignées. Accepter ce redécoupage de la carte électorale comme il est proposé, c’est accepter de ne pas être entendu, représenté et de ne pas pouvoir participer justement à la vie démocratique du Québec. »

L’QRP va plus loin en demandant non seulement le statu quo, mais également de proférer aux circonscriptions de Gaspé et de Bonaventure que des statuts exceptionnels soient enchâssés dans la Loi électorale, à l’instar des Îles-de-la-Madeleine, afin de préserver une bonne fois pour toutes les limites actuelles et le poids de la Gaspésie à l’Assemblée nationale. Pareille idée avait notamment été avancée plus tôt par la députée de Bonaventure, Catherine Blouin. « On doit faire tout ce qu’on peut pour minimalement maintenir le statu quo, mais ultimement réclamer un statut d’exception. »

Plus à l'est, Stéphane Sainte-Croix a par ailleurs utilisé son boulier pour faire quelques calculs, puisque le DGE semble friand de statistiques. Il souligne que les régions du Bas-Saint-Laurent et de la Gaspésie auront un poids électoral inférieur à ce que leur population justifierait, ne conservant que quatre circonscriptions selon la proposition de la Commission, alors que leur poids électoral devrait leur en attribuer 4,36.

« Avec la proposition sur la table, le comté de Gaspé-Bonaventure serait 11% au-dessus de la moyenne provinciale en termes d’électeurs, une anomalie évidente quand on la compare à des circonscriptions similaires dans les régions éloignées. Notre circonscription aurait des caractéristiques démographiques se rapprochant des comtés urbains avec une réalité géographique unique au Québec », proteste-t-il.

« En considérant les distances effectives à parcourir pour rencontrer ses électeurs, la nouvelle circonscription de Gaspé-Bonaventure couvrirait plus de 500 kilomètres, l'équivalent de la distance entre Montréal et Toronto! S'ajoute à cela le trajet de la Gaspésie à Québec, qui peut prendre jusqu'à 8 h 30... Il est difficile d'imaginer comment un député pourrait exercer efficacement ses fonctions avec une telle proposition », ajoute Stéphane Sainte-Croix.

Stéphane Sainte-Croix

©Jean-Philippe Thibault - Chaleurs Nouvelles

Stéphane Sainte-Croix.

Catherine Blouin, adjointe gouvernementale du ministre de la Santé et députée de Bonaventure

©Photo : Le Laurentien - Charles Lepage

La député de Bonavenure, Catherine Blouin.

Son homologue dans Bonaventure a elle aussi maintes fois décrié la possibilité de fusion les deux circonscriptions gaspésiennes. « C’est une perte de poids politique pour la région. C’est profond comme cause. Je le fais comme députée, mais aussi comme citoyenne. On ne peut pas rester là à rien faire et baisser les bras, exprimait récemment Catherine Blouin. Nos réalités doivent être considérées et on doit revendiquer nos droits. Il ne faut pas croire que c’est impossible. On doit tout donner pour y arriver. »

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