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16 avril 2022

Serons-nous assez rapides pour empêcher l'extinction du caribou?

VULGARISATION SCIENTIFIQUE

Caribou

©Photo Gracieuseté - Tristan Rivest

Il reste à peine une trentaine de caribous en Gaspésie.

L’extinction d’espèces devient de plus en plus commune autour du globe. Malgré son territoire très vaste et relativement peu peuplé, le Québec fait aussi face à cette problématique. Une des espèces emblématiques de notre patrimoine, le caribou des bois se retrouve aujourd’hui au bord de l’extinction.

Pour commencer, il est important de distinguer les 3 différents types de caribous des bois présents sur le territoire: le caribou toundrique, le caribou montagnard et le caribou forestier. Ces 3 types de caribous sont très différents les uns des autres à la fois physiquement et génétiquement, car ils se sont tous adaptés à des environnements et à des modes de vie différents. De nos jours, le caribou montagnard de la Gaspésie et le caribou forestier sont sur le point de disparaître, ce qui voudrait dire une perte définitive d’une sous-espèce de la surface du globe où aucune réintroduction de caribou ne pourrait remplacer les hardes perdues. 

Actuellement, seulement deux populations isolées de caribous forestiers se retrouvent au sud du 49e parallèle: la harde de Charlevoix composée d’approximativement 23 caribous et celle de Val-d’Or constituée de 7 individus, placés en enclos. Les caribous montagnards de la Gaspésie représentent la dernière population intacte de caribou montagnard dans l’est du Canada et est composée d’environ 40 individus. Comment en sommes-nous arrivés là alors qu’au 19e siècle les caribous peuplaient l’ensemble du territoire québécois? Malheureusement, la chasse intensive des années 1890 à 1920 et les coupes forestières ont causé l’isolement et le déclin fulgurant des hardes de caribou. Actuellement, la principale menace pour les caribous des bois du Québec est la détérioration de leur habitat qui découle notamment de l'industrie forestière.

La perte de forêts matures engendrée par l’exploitation forestière peut nuire de différentes façons aux caribous. Effectivement, ces derniers ont besoin, tout au long de leur développement, d’un couvert forestier et de la présence de lichens arboricoles qui sont des caractéristiques propres aux forêts matures. La faible présence de lichens dans les jeunes forêts limite les réserves alimentaires des caribous lors des périodes plus difficiles telles que l’accouplement et l’hiver.

De plus, les zones d’après coupes sont riches en ressources pour l’orignal, augmentant ainsi son abondance dans le secteur. La forte abondance d’orignaux dans un secteur augmente du même coup la quantité de prédateurs tels le coyote, l’ours noir et le loup gris, ce dernier étant seulement présent au nord du fleuve Saint-Laurent. Partageant les mêmes prédateurs que l’orignal, le caribou se retrouve toutefois plus sévèrement affecté par la prédation en raison d’une plus faible quantité de jeunes produits par les femelles. La faible quantité de connexions entre les îlots de forêts matures causés par l'industrie forestière, briment les déplacements des individus et contribuent à isoler géographiquement les populations de caribous. Aussi, les espaces ouverts causés par cette même industrie telle que les routes, les sentiers et les zones de coupes augmentent l’exposition du caribou à la prédation à la fois en limitant leurs déplacements, mais aussi en facilitant celui de leurs prédateurs.

La meilleure solution pour protéger les caribous forestiers et montagnards présents sur le sol québécois serait d’interdire toute activité d’exploitation forestière à l’intérieur et en périphérie de leurs habitats actuels. Malheureusement, cette mesure est difficilement envisageable pour l’industrie forestière, dont les revenus dépendent des activités de coupes. Il serait toutefois possible, lors des interventions forestières, d’épargner ou de reproduire certains éléments typiques des forêts matures afin de conserver un habitat essentiel pour le caribou.

Remplacer une coupe totale de grande superficie par plusieurs petites coupes partielles permettrait de conserver des secteurs prioritaires tels que des zones de mise bas, de rut, d’hivernage ou d’alimentation. De plus, la création ou la conservation de connectivité entre ces différentes zones facilite les déplacements du caribou et réduit la vulnérabilité. Un autre moyen d’aider le caribou serait d’éviter la construction de routes dans leurs corridors de déplacement si possible et lorsque leur présence est obligatoire, procéder à leurs renaturalisations après leur utilisation. Finalement, il est important de travailler de pair avec les biologistes ou autres experts du caribou lorsqu’il est temps de mettre en place des plans d’aménagement pour sa conservation. Il est aussi primordial de prendre en considération les études identifiant les zones prioritaires à protéger et les divers impacts de la foresterie sur l’espèce.

La situation du caribou est plus précaire que jamais. Malgré tout, certaines actions peuvent toujours être mises en œuvre afin de sauver cette espèce emblématique d’une mort certaine. Serons-nous assez rapides pour empêcher son extinction?

Par Michaël Ouellet, Hubert Dupuis, Sophie Guibert, Clara Martel et Emmanuelle Raymond

Étudiants au baccalauréat en biologie à l'Université du Québec à Rimouski

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